Concept
Le leet speak est un langage de texte alternatif qui remplace les lettres par des chiffres ou des symboles.
Questionnant les stratégies de détournements de la société de cyber contrôle et de la censure opérant une orientation des discours, « n07r3 $1l3n¢3 » relève, au sein du numérique, les gestes visuels et la création d’une langue outrepassant l’oppression algorithmique.
Inventer une langue comme on invente un monde. Une langue que les algorithmes ne peuvent comprendre. Une langue de citoyen.ne.s révolté.e.s, lessivé.e.s mais imbaillonables. Une langue que nous célébrons et que nous voulons vivante car elle ne respecte rien des ordres orthographiques ou des conventions. Car la seule chose qui compte est qu’elle soit entendue. Une langue mutante qui cherche les vérités outre les contre-vérités soutenues par les médias mainstream, notre monde, notre continent. Une langue qui cherche à dire ce qu’on ne peut pas dire, la merde, l’amour, la colère, la perte, le souvenir, l’intimité. Une langue qui se plie, qui se tord, qui se joue de symboles et de gestes. Une langue qu’en fin de compte, on comprend facilement.
Sous forme de captcha* physique s’emparant de l’espace, cette installation spécifiquement conçue pour l’exposition FORMAT requière un mouvement tant physique que critique, que la staticité rend inaudible.
Issue d’un corpus qui questionne la néocensure des mobilisations en ligne, notamment celles dénonçant la complicité coloniale et génocidaire, cette installation demande une démultiplication des points de vues ; l’incarnation de notre faculté anthropique à nous décentrer ; à voir depuis ailleurs.
*CAPTCHA est une famille de tests de Turing permettant de différencier de manière automatisée un utilisateur humain d’un ordinateur. Ce test de défi-réponse est utilisé en informatique pour vérifier que l’utilisateur n’est pas un robot.
Présentation
Au sein de dispositifs qui se déploient dans l’espace Zoé Aubry (1993) développe une pratique de recherche critique, résolument militante, féministe et expérimentale par le biais de la photographie. Inversant la logique de l’économie de l’attention à travers l’usage d’images pauvres, son travail vise à révéler les mécanismes de visibilité, d’hypervisibilité et d’invisibilité des récits médiatiques dominants. Les images endommagées dont elle se sert agissent, activent, arment, suturent, se recomposent dans un mouvement collectif.
Son approche explore des questions de résistance aux systèmes de pouvoir et d’oppression numérique, s’appuyant sur une relation entre phénomènes sociétaux et expériences individuelles. Titulaire d’un bachelor en photographie de l’ECAL – École cantonale d’ art de Lausanne et d’un master en pratiques artistiques contemporaines de la HEAD – Haute école d’art et de design de Genève, son livre #Ingrid (2022), coédité par RVBBOOKS et Gato Negro Ediciones, a été sélectionné pour le Prix du livre Autor aux Rencontres d’Arles et a remporté le prix du plus beau livre suisse.
Son travail a été présenté dans des expositions collectives et individuelles, notamment « The Lure of the Image » au Fotomuseum Winterthur, « LES RESISTANTES » à Paris, « Concerned » au Musée international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, au Musée des beaux-arts du Locle ou à Arles, ainsi que dans plusieurs festivals, dont le Festival de la photo d’Athènes, la Biennale de l’image tangible Paris, le Guernsey Photography Festival ou Les Rencontres de la Photographie de Marrakech. Elle a été lauréate du Enquête photographique de la ville de Genève en 2021 et du Prix fédéral de design en 2018.
En parallèle, elle lutte au sein de projets collectifs et associatifs et co-fonde plusieurs initiatives où le travail culturel et l’engagement politique se rencontrent pour militer tant vers des utopies que des perspectives de terrain directes.